“Le réel merveilleux de la Martinique dans "Rue Monte au Ciel" de Suzanne Dracius” par Valérie BUDIG-MARKIN, Humboldt University, California, USA
L’ouverture de "Rue Monte au Ciel" (Éditions Desnel, 2003) affirme le rapport entre l’œuvre de Suzanne Dracius et le concept du baroque fabuleux de l’avenir envisagé par l’écrivain cubain Alejo Carpentier. Ce que les historiens voudraient remettre dans leur poche historique est revu, refiguré par Dracius, comme par Carpentier, et reprojeté en avant. Les concepts, les points de vue, les peuples et les langues entamant un dialogue dans les textes de "Rue Monte au Ciel" jaillissent d’une source, d’un centre révolutionnaire de la terre natale.
Littérature, traités historiques, mythologies, oralité, cultures du monde entier, ainsi que l’histoire de sa propre famille forment la matière bouillante d’une Montagne Pelée. Le volcan a déjà vomi son message de liberté en 1902 et l’avenir se déclare prometteur d’une nouvelle éruption.
De façon discrète, Carpentier a inséré une spirale dans la structure de son roman de 1962 intitulé "Le siècle des lumières", imitant un coquillage sur la plage qui tient la clé d’une future révolution. Si la justice sociale l’exige et le peuple se dresse dans sa riche multiplicité originaire contre l’oppression ou contre l’imposition d’une identité « autre », cette force inimitable gagnera de l’énergie et explosera. La résistance caribéenne chez Dracius puise dans le métissage, la nature, le nouveau et le traditionnel de la Martinique. Son "vieux diable réveillé de son sommeil millénaire" côtoie la belle Virago aux ongles vernis — et l’identité ressortie de cette confluence heureuse pourrait bien être la formule d’un avenir de rupture qui serait à la fois une guérison, une réunification, et une égalisation.
Communication au CIEF à Cayenne le 5 juillet 2007 à 10 h 45